MODULE IV - Styles de Leadership

MODULE IV - Styles de Leadership

OBJECTIFS:

  • Examiner et explorer les différents styles de leadership et leur effet sur le recrutement des militants et le taux de rétention dans l'équipe syndicale.
  • Identifier et discuter des différents styles de leadership dans un modèle de syndicalisme de service et organisateur.

Dans le cours Promotion du militantisme syndical, nous avons vu que dix grandes études des syndicats en Amérique du Nord ont conclu qu’une influence importante sur les attitudes du public et des syndiqué‑e‑s canadiens à l’endroit des syndicats est la nature du style de leadership qu’exercent les responsables et les représentantes et représentants syndicaux. Ici, le terme « dirigeante ou dirigeant syndical » désigne la dirigeante ou le dirigeant au niveau local plutôt qu’au niveau national, et s’applique principalement aux membres de l’Exécutif et aux délégué‑e‑s syndicaux.

Selon les études susmentionnées, les « chefs syndicaux jouent un rôle important pour favoriser l’engagement des membres de la base ». De plus, elles ont constaté que « le style de leadership et ses caractéristiques influencent donc d’une manière cruciale la manière dont l’organisation syndicale est responsable relativement aux aspirations des membres en général et à la façon dont la sensibilisation collective et le militantisme de l’ensemble des travailleuses ou travailleurs peuvent être stimulés ». De plus, ces mêmes études ont révélé, dans une vaste majorité des cas, que « la participation des membres aux activités syndicales varie en fonction des habiletés interpersonnelles des délégué‑e‑s et de leur accessibilité aux membres ».

Étant donné que le style de leadership est directement lié au recrutement de nouvelles militantes et de nouveaux militants et a peut-être un rapport encore plus immédiat avec la capacité de conserver et de développer les représentantes et représentants déjà en place, nous allons maintenant examiner nos propres styles de leadership.

QUESTIONNAIRE D’AUTO-ÉVALUATION DU STYLE DE LEADERSHIP

Question 1

Votre section locale prépare un programme d’activités pour appuyer votre équipe de négociation pendant des négociations difficiles. Vous :

  1. Demandez à vos membres de porter des macarons et/ou des autocollants,
  2. Élaborez un plan de campagne et le soumettez à l’approbation de votre Exécutif local en vue de sa présentation aux membres,
  3. Nommez un comité de dirigeantes et dirigeants et de délégué‑e‑s syndicaux pour arrêter une stratégie de campagne,
  4. Sollicitez les membres pour former un comité de bénévoles à qui vous déléguerez la responsabilité et le pouvoir de formuler la stratégie de campagne en demandant les idées des membres.

Question 2

Le SEI, au niveau national, lance une campagne de griefs sur un problème de dotation et demande aux sections locales de la mettre en œuvre. Vous :

  1. Parlez à certains membres, pour leur demander de présenter des griefs,
  2. Envoyez une note écrite à tous vos membres, pour expliquer la campagne nationale et demander des griefs,
  3. Tenez une réunion de l’Exécutif local et des délégué‑e‑s syndicaux pour expliquer la campagne nationale. Demandez à ces personnes d’aller parler de la campagne aux membres en milieu de travail et de leur demander des griefs,
  4. Après avoir transmis les renseignements du Bureau national, vous tenez une assemblée des membres pour expliquer la campagne, répondre aux questions et préoccupations et demander l’appui des membres.

Question 3

Il y a trois mois, Michelle a commencé à travailler dans votre division. Elle est venue vous voir plusieurs fois pour vous demander pourquoi elle doit faire partie du syndicat puisqu’elle n’y voit aucun avantage. Vous l’apercevez qui se dirige vers vous à la cafétéria. Vous :

  1. Décidez que vous n’avez pas faim et sortez rapidement. Inutile de tâcher de lui parler. Vous n’allez pas lui faire changer d’idée,
  2. Dès qu’elle s’asseoit à votre table, vous vous lancez dans une explication détaillée de la formule Rand. Elle va peut-être être impressionnée par vos connaissances techniques,
  3. Discutez calmement avec elle les avantages de l’appartenance au syndicat et les gains que le syndicat a obtenus. Même si elle a déjà rejeté plusieurs de vos arguments auparavant, vous savez que vous avez raison,
  4. Discutez calmement des avantages de l’adhésion syndicale et lui faites comprendre que la meilleure façon de se renseigner sur le syndicat est d’y militer. Vous lui dites qu’il y a plusieurs comités qui ont besoin de bénévoles et que vous lui téléphonerez l’après-midi même pour lui donner plus de détails, si cela l’intéresse.

Question 4

Un nouveau membre de l’Exécutif a assisté à un certain nombre de séances de formation et prend contact avec certains membres qui vous ont dit que cette personne songe à se présenter contre vous à la présidence aux prochaines élections de la section locale. Vous :

  1. Précipitez le lancement de votre campagne. Vous voulez rappeler à tous les membres de votre section locale avec quelle ardeur vous avez travaillé pour eux dans le passé et vous renouvelez publiquement votre engagement. En fin de compte, « à qui se lève matin, Dieu prête la main »,
  2. Critiquez discrètement et délibérément votre adversaire devant les autres membres. Même si son engagement peut être, en fait, authentique, vous estimez que vous êtes la meilleure personne pour le poste et que votre réélection est au mieux des intérêts des membres,
  3. Allez trouver l’autre candidate, lui demandez pourquoi elle se présente à la présidence et tâchez de la persuader de se présenter à la vice-présidence, en lui promettant de lui déléguer des pouvoirs et de partager des avantages, comme les voyages et d’autres fonctions agréables,
  4. Discutez de la situation en privé avec l’autre candidate et admettez en toute franchise que vous tenterez de vous faire réélire. Vous lui dites également que, gagne ou perd, vous espérez pouvoir travailler avec elle après les élections. Vous menez une campagne vigoureuse, en vous arrêtant uniquement aux enjeux, sans parler de l’autre candidate. Que le meilleur ou la meilleure gagne.

Question 5

Le Congrès triennal du SEI approche, et votre section locale doit nommer les trois délégué‑e‑s auxquels vous avez droit. Les Statuts de votre section locale permettent à l’Exécutif de choisir les délégué‑e‑s. Les six membres de votre Exécutif local (y compris vous-même) ont exprimé le désir d’y assister. Vous :

  1. Faites valoir que, en tant que présidente ou président de section locale, vous devriez être là et proposez que l’Exécutif local choisisse les deux autres délégué‑e‑s. En fin de compte, les membres vous ont élu à la présidence,
  2. Proposez que les six membres de l’Exécutif y assistent, en faisant désigner trois délégué‑e‑s et trois observatrices et observateurs par l’Exécutif local. En fin de compte, tous les membres de l’Exécutif ont travaillé fort pendant leur mandat et, même si votre budget ne prévoit pas l’envoi de six personnes, votre section locale a un bon surplus,
  3. Faites valoir que, en tant que présidente ou président de la section locale, vous devriez être là, mais convenez que l’Exécutif local devrait choisir les trois délégué‑e‑s. Tout en estimant que vous devriez être délégué‑e, vous êtes disposé‑e à accepter les résultats d’un vote,
  4. Soumettez la question aux membres réunis en assemblée générale, en recommandant d’envoyer trois délégué-e-s et trois observatrices et observateurs. C’est la seule façon équitable de régler la question, et le budget ne prévoyait pas l’envoi de tous les membres de l’Exécutif au Congrès.

Question 6

Une syndiquée vient vous trouver pour se plaindre du mauvais service qu’elle a reçu d’un délégué syndical local qui n’a pas présenté son grief dans les délais prescrits. Le délai d’admissibilité de son grief est passé, et elle ne peut plus le présenter. Elle est extrêmement fâchée parce que, si elle avait eu gain de cause avec son grief, elle recevrait plus de 5 000 $ de rémunération d’intérim. Vous :

  1. Lui dites que rien ne garantit qu’elle aurait eu gain de cause et que vous ne pouvez rien y faire. En fin de compte, le délégué syndical est un bénévole, qui fait de son mieux,
  2. Lui dites que vous consulterez la vice-présidente régionale ou le vice-président régional pour voir s’il y a moyen de réactiver le grief. Vous convenez avec elle que le délégué syndical aurait dû être plus diligent et promettez de lui revenir sans tarder. La protection de ses droits est plus importante que la poursuite de l’enquête à ce stade‑ci,
  3. Lui dites que vous devrez parler au délégué syndical pour connaître sa version de l’affaire. En fin de compte, la plaignante peut se tromper et le grief est peut-être encore admissible, ou le délégué syndical avait peut-être des raisons valides de rater les échéances. Vous promettez de lui revenir sans tarder. En écoutant les deux versions, vous saurez mieux quoi faire,
  4. Écoutez la plainte de la plaignante et proposez d’organiser avec elle une réunion avec le délégué syndical le plus tôt possible pour réunir tous les renseignements nécessaires, afin de voir s’il est effectivement trop tard pour présenter le grief et déterminer s’il y a une solution au problème (si problème il y a). Vous communiquez immédiatement avec le délégué syndical, en privé, pour l’informer de la plainte de la plaignante et lui proposez de vous rencontrer tous les trois le plus tôt possible pour en discuter. Il s’agit non seulement de régler le problème, mais également de donner à la plaignante et au délégué syndical la possibilité de trouver eux-mêmes une solution.

Question 7

Vous soupçonnez que votre trésorière locale a détourné des fonds à ses fins personnelles. Vous avez demandé à la trésorière de vous laisser examiner les livres, et elle cherche des faux-fuyants et, sans aller jusqu’à refuser de remettre les livres, elle trouve toutes sortes d’excuses pour ne pas l’avoir encore fait. Vous :

  1. Parlez en privé à certains membres de votre Exécutif local, à qui vous vous ouvrez de vos soupçons et demandez leur appui pour presser la trésorière de remettre les livres. Quelle que soit la situation, il est de la plus haute importance que les finances de la section locale soient en règle,
  2. Communiquez avec la vérificatrice de la section locale pour lui faire part de vos soupçons, et lui demandez de prendre contact avec la trésorière,
  3. Convoquez une réunion de l’Exécutif local, expliquez que vous croyez qu’il y a peut-être des écarts comptables et présentez une motion pour vous faire remettre les livres pour examen. Vous appliquez le règlement dans ce cas‑là,
  4. Vous prenez contact en privé avec la trésorière pour discuter de votre conviction, et lui demandez encore une fois de vous laisser examiner les livres. Vous appuyez votre demande d’une communication écrite, en fixant un délai de réponse à votre demande et disant que, si elle ne donne pas suite à votre demande, vous soulèverez la question au niveau de l’Exécutif local. Vous lui donnez toutes les occasions possibles de se justifier et/ou de s’expliquer.

Question 8

Pendant le Congrès triennal du SEI, un délégué d’une autre section locale de votre région vous a dit que l’un des observateurs de votre section locale avait consommé une quantité excessive d’alcool la veille au soir et n’avait assisté à aucune des séances de la journée. Vous n’étiez pas au courant de cet incident. Vous :

  1. Remerciez le délégué de vous avoir signalé la chose, mais lui dites que vous étiez au courant de l’affaire et que vous alliez y voir. Vous informez votre observateur des renseignements qui vous ont été communiqués et vous lui dites que d’autres surveillent sa conduite. Les apparences sont très importantes, mais vous comprenez aussi comment cela a pu se produire,
  2. Remerciez le délégué de vous avoir signalé la chose et confrontez l’observateur, en lui disant que la section locale ne paiera pas son salaire et ses dépenses pour la journée. Il est évident qu’il faut le mettre au pas immédiatement,
  3. Remerciez le délégué de vous avoir signalé la chose. Vous confrontez l’observateur, en lui demandant d’expliquer son absence et lui disant que vous êtes obligé de ne pas lui rembourser son salaire et ses dépenses pour la journée. Tout en faisant preuve de compréhension, vous jugez important de lui faire comprendre que le Congrès est une question de travail d’abord et que, bien qu’il y ait beaucoup d’activités mondaines, les congressistes sont là aux frais des membres,
  4. Remerciez le délégué de vous avoir signalé la chose. Vous allez trouver l’observateur, et l’informez que vous êtes au courant de son absence et lui demandez de s’expliquer. Après avoir écouté son explication, vous demandez à l’observateur quel serait le remède approprié à la situation, y compris les sanctions/conséquences appropriées, le cas échéant. S’il participe à la solution, il aura moins l’impression de faire partie du problème.

Question 9

Un directeur de BSF/CF vous a parlé d’une allégation d’abus de congés pour affaires syndicales de la part d’un de vos vice-présidents. À moins que vous ne puissiez mettre fin aux abus, vous dit‑il, il instaurera une politique de congés pour affaires syndicales qui s’appliquera à toutes les représentantes et tous les représentants de la section locale. Vous :

  1. Vous portez immédiatement à la défense de votre vice-président, en invoquant les dispositions de la convention collective au sujet des congés pour affaires syndicales et promettant de vous retirer du processus de consultation syndicale-patronale s’il instaure une politique sur les congés pour affaires syndicales. En fin de compte, la meilleure défense est une solide offensive, et vous devez protéger vos représentantes et représentants locaux.
  2. Dites tout de suite au directeur que vous allez parler immédiatement à votre vice-président et convenez de régler le problème. Il vaut mieux maintenir une relation amicale et agréable avec le directeur,
  3. Demandez au directeur de vous donner les détails de l’abus allégué, convenez de parler de l’affaire à votre vice-président et promettez de revenir au directeur rapidement pour rediscuter de l’affaire et trouver un remède au problème, si nécessaire. Il importe de connaître les deux versions avant de trop vous engager,
  4. Demandez au directeur de vous donner les détails de l’abus allégué, convenez de discuter de la question avec votre vice-président et offrez de convoquer une réunion entre le vice-président, le directeur et vous-même pour examiner la question plus à fond et trouver un règlement acceptable pour tous. La meilleure solution est habituellement celle qui vient des parties au conflit.

Question 10

En examinant les dossiers de griefs de la section locale pour la dernière année, vous notez qu’aucun des griefs présentés par la déléguée syndicale en chef n’a été admis, que les dossiers n’étaient pas bien tenus et que de nombreux arguments évidents, mais convaincants, n’ont pas été avancés. Vous :

  1. Concluez que la déléguée syndicale en chef n’est pas entièrement compétente et la confrontez avec vos conclusions. Vous lui dites qu’elle devrait peut-être vous montrer toutes ses présentations avant de les avancer à des auditions de grief. Elle trouvera peut-être votre intervention un peu embarrassante, mais c’est ce qui est au mieux des intérêts des membres,
  2. Abordez la déléguée syndicale en chef avec vos conclusions et offrez de l’envoyer suivre des cours du syndicat sur les griefs, pour l’aider à améliorer ses compétences dans ce domaine. Vous avez reconnu le problème et prenez les mesures nécessaires pour le régler,
  3. Abordez la déléguée syndicale en chef et lui demandez de vous rencontrer pour discuter des griefs. Expliquez que l’objectif est de l’aider à représenter les membres dans la procédure de grief et que l’examen des dossiers de griefs vous a fait constater qu’elle s’acquitte bien de ses fonctions, mais qu’il y a peut-être certains points où elle saurait profiter d’un complément de formation. Vous voulez l’amener à s’engager à suivre les cours de formation. C’est une situation qui ne fait que des gagnants, et qui rejette sur elle le fardeau,
  4. Abordez la déléguée syndicale en chef et lui demandez de vous rencontrer pour discuter des griefs. Expliquez que votre objectif est de l’aider à représenter les membres dans la procédure de grief et que l’examen des dossiers de griefs vous a fait constater qu’elle s’acquitte bien de ses fonctions, mais qu’il y a peut-être certains points où elle pourrait profiter d’un complément de formation. Vous lui offrez également de travailler avec elle à perfectionner ses compétences, lui proposez de mettre sur pied un comité des griefs et continuez de surveiller la qualité des présentations de griefs. Cela pourrai vous demander un certain temps, mais vous savez que vous pourrez arriver à déléguer cette tâche à un comité responsable. En outre, en suivant cette voie, la représentation aux griefs sera une responsabilité partagée.

Quand vous rentrerez dans vos sections, vous souhaiterez peut-être distribuer ce questionnaire aux membres de votre Exécutif local et leur demander de le remplir en décrivant votre style de leadership tel que le perçoivent des tiers. Encouragez-les à être francs, mais soyez prêt à accepter avec un esprit ouvert la façon dont les autres vous perçoivent.

Lorsque nous avons étudié le modèle de service et le modèle organisateur du syndicalisme dans le cours de promotion du militantisme des membres, nous avons pris conscience que le modèle de service aux membres, laisse bien peu de place à une participation véritable de ces derniers, tandis que dans un modèle organisateur, la notion d’action collective et d’habilitation (du pouvoir) des membres prennent toute sa dimension. Comme nous l’avons également vu, depuis de nombreuses années, notre syndicat fonctionne selon un modèle de service et nos styles de leadership ont donc évolué à la lumière d’un tel modèle. Il s’ensuit que si nous tenons véritablement à promouvoir l’action et l’appui des membres, il nous faut nous engager aussi à examiner minutieusement nos styles de leadership et être prêts à adopter un style qui privilégie la mobilité des membres et la conservation et la promotion des militantes et militants.

Modèle de service

  • Représentation directe des membres
  • Utilise des méthodes et procédures déjà conçues et mises au point
  • Suppose qu’en assurant la défense des droits individuels et collectifs dans leur rôle de défenseurs, le syndicat fera comprendre aux membres qu’ils ont un intérêt personnel à l’appuyer
  • Crée une relation d’affaires entre le syndicat et ses membres
  • Favorise chez les membres la perception du syndicat comme tierce partie
  • Nuit au sentiment d’appartenance des membres envers leur syndicat

En résumé, dans le cours de promotion du militantisme des membres, nous avons constaté que dans le modèle de service, la représentation des membres est en général perçue comme une représentation directe, que cette représentation directe s’exprime par l’intermédiaire de procédures et méthodes déjà conçues et élaborées, que ces procédures et méthodes sont fondées sur l’hypothèse qu’en défendant les droits individuels et collectifs dans un contexte militant, les membres verront qu’il est dans leur propre intérêt d’appuyer leur syndicat. Nous avons aussi constaté, toutefois, que le modèle de service institue une relation similaire à une relation d’affaire entre le syndicat et les syndiqué‑e‑s et favorise chez les membres la perception que le syndicat est un tiers. Le modèle de service ne nourrit pas le sentiment d’appartenance des membres envers leur syndicat.

Modèle organisateur

  • Représentation des membres par la participation et la collaboration
  • Le succès est directement lié à l’effort conjoint des parties
  • Habilite, mobilise et organise les membres pour les aider à passer à l’acte
  • Peut utiliser des méthodes et procédures déjà conçues et mises au point ou rechercher des stratégies innovatrices
  • Suppose qu’en impliquant les membres et agissant comme mentor, guide ou expert technique, le syndicat donnera à ses membres un sentiment d’appartenance de leur syndicat
  • Considère les enjeux ou les activités comme une occasion de mobiliser les membres et d’accroître leur participation à leur syndicat.

À l’inverse, nous avons constaté que dans le modèle organisateur, la représentation emprunte habituellement une démarche de participation et de collaboration entre les syndiqué‑e‑s et les représentantes et représentants syndicaux, le succès étant considéré comme directement tributaire de l’effort conjoint des parties. Le modèle organisateur permet de réaliser l’habilitation des membres ainsi que leur mobilisation et syndicalisation de façon qu’ils puissent passer à l’acte, et aide les membres dans cette démarche tout en favorisant leur sentiment d’appartenance à leur syndicat. Essentiellement, dans le modèle organisateur, les représentantes et représentants syndicaux considèrent chaque question ou chaque activité comme une occasion d’amener les membres à s’engager et à accroître leur participation au syndicat.

La comparaison de ces deux modèles de syndicalisme révèle de façon évidente que le style de leadership dans un modèle peut dans une grande mesure être divergent par rapport au style de leadership de l’autre modèle et même à son opposé. On pourrait qualifier le style de leadership associé au modèle de service comme étant davantage centré sur la tâche, tandis que le style de leadership associé au modèle organisateur pourrait être décrit comme étant centré sur la personne et sur les ressources. Il est donc très important, lorsqu’on veut modifier des styles de leadership, de prendre conscience des caractéristiques, des attitudes et des comportements différents associés à chacun des modèles et de définir leurs avantages et désavantages.

Pour être un ou une chef vraiment efficace – c’est‑à-dire être quelqu’un qui traite des questions, des préoccupations et des difficultés présentes, tout en maximisant les occasions de participation et d’action collective des membres – un dirigeant ou une dirigeante doit développer un style de leadership qui englobe les caractéristiques et les particularités positives à la fois du modèle de service et du modèle organisateur.

Un très grand nombre de recherches sur le leadership syndical ont gravité autour de classifications psychologiques visant à catégoriser les divers types de comportement de leadership. De même, en grande majorité, les études menées depuis 25 ans ont permis de dégager principalement quatre types de chefs syndicaux liés à deux styles de chefs syndicaux, à savoir, les « délégué‑e‑s » et les « représentantes et représentants ».

Les délégué‑e‑s se voient confier par les membres le mandat unique de réaliser les désirs exprimés de ces derniers. Par opposition, les « représentantes et représentants » adoptent un rôle de leadership et exécutent des politiques non seulement en fonction des désirs exprimés des membres, mais aussi par suite d’initiatives personnelles. Relativement à deux aspects du pouvoir, le lancement et la régie des questions du point de vue des procédures, et le maintien d’une idéologie et d’un ensemble d’institutions, ce sont les chefs « représentantes et représentants » qui ont manifestement fait preuve d’une plus grande efficacité. Même si les chefs doivent favoriser la participation des membres de la base, et devraient adopter une perspective collectiviste, il leur faut aussi faire preuve de « leadership ».

Un autre aspect du style de leadership relevé par les études se rapporte à l’importance que place la ou le chef sur la participation et le collectivisme. Un style centré sur la participation place surtout l’importance sur les communications, la consultation et la participation des membres à la prise de décisions. Dans une perspective collectiviste, les questions sont perçues par les chefs locaux comme se rapportant à une situation de travail partagée et à l’engagement des membres plutôt que comme se rapportant à des griefs particuliers. Sous cet angle, les chefs qui favorisent une démarche participative et collectiviste peuvent bâtir à partir de toute augmentation subite de la participation et de l’intérêt des membres. La force du syndicalisme en milieu de travail s’en trouve accrue, particulièrement pour quelqu’un qui considère que la volonté des membres d’agir au nom du syndicat est un fondement nécessaire de l’efficacité de tout mouvement syndical. Des études ont également confirmé l’opinion selon laquelle il y aurait un lien entre les styles participatifs de leadership et l’augmentation de l’engagement et de la participation des membres.

Bien que beaucoup de syndiqué‑e‑s puissent penser qu’ils élisent les délégué‑e‑s pour uniquement exécuter la volonté des membres, ces derniers s’attendent effectivement à ce que les délégué‑e‑s jouent un rôle de représentation. Dans cette mesure, les membres s’attendent que les chefs assumeront un rôle qui consistera à les défendre, mais ils insistent que leurs opinions et leur apport doivent être pris en compte par ces mêmes chefs syndicaux au moment d’agir en tant que leur représentante ou leur représentant.

Les études ont aussi relevé l’existence d’un lien entre le style de leadership et la qualité des rapports entre les syndicats et la direction, ce style étant considéré comme ayant une incidence importante sur la satisfaction des membres à l’endroit de leur syndicat. Une telle constatation amène à s’interroger sur la nature de l’engagement qui lie les syndicats et la direction en milieu de travail et la manière dont les dirigeantes et dirigeants syndicaux gèrent un tel engagement. En grande partie, le débat semble centré sur la question de savoir si les syndicats devraient, ou pas, faire ressortir les intérêts communs des syndicats et de la direction, plutôt que de privilégier les principes d’opposition, ou, autrement dit, d’une démarche contradictoire. En bout de ligne, il est possible de prétendre que les modalités de toute coopération avec la direction, au niveau du milieu de travail, doivent être formulées avec soin si l’on veut conserver l’appui des membres.

Beaucoup de syndiqué‑e‑s sont d’accord sur le fait que la relation qui prévaut entre un syndicat et la direction relève à la fois d’une démarche d’opposition, au besoin, et d’une démarche de coopération lorsqu’elle est utile. Ces syndiqué‑e‑s ne prévoient pas que leur syndicat et les dirigeantes et dirigeants syndicaux ne changeront jamais ou adopteront invariablement toujours le même style, et ne le veulent pas non plus. En fait, les études dont il a déjà été fait mention ont constaté que les syndiqué‑e‑s, en réponse à des questions similaires, ont souvent dit être favorables à l’adoption de styles divergents à la lumière de la question du jour et de la qualité du rapport de coopération entre le syndicat et la direction. Les réponses au sondage ont montré que les syndiqué‑e‑s étaient d’avis que leurs dirigeantes et dirigeants étaient parfois trop modérés, et parfois trop militants ou, par ailleurs, faisaient à l’occasion preuve d’un trop grand individualisme et, en d’autres occasions, d’un trop grand collectivisme. Ces réponses indiquaient que les membres étaient d’avis que le comportement de leurs représentantes et leurs représentants syndicaux était parfois trop empreints d’un esprit de coopération et, en d’autres occasions, trop empreints d’un esprit d’opposition.

Étant donné les points de vue contradictoires et contraires des membres à cet égard, les représentantes et représentants syndicaux ne doivent jamais croire qu’il convient de choisir un style de leadership ou un autre à la lumière de l’appui traditionnellement reçu, ou refusé, de la part des membres. Il est impératif, plutôt, d’accorder une place prépondérante aux communications soutenues avec les membres, pour que les dirigeantes et dirigeants puissent savoir ce que pensent les membres de toute question particulière, à tout moment donné. D’un autre côté, les représentantes et représentants syndicaux ne doivent jamais perdre de vue que les perceptions des membres et leurs exigences sont en évolution constante et ne peuvent pas toujours être ramenées à un simple calcul rationnel.

Certaines études font également ressortir à quel point il importe que les chefs syndicaux satisfassent les aspirations et répondent aux attentes des membres s’ils veulent conserver leur appui. Il peut s’agir de questions de démocratie syndicale en milieu de travail, et de la manière dont les dirigeantes et dirigeants syndicaux favorisent une telle démocratie, les perceptions des membres étant fondées sur l’opinion qu’ils se font de la représentativité, de la responsabilité et de l’engagement de leur syndicat. La tendance dans le sens de la divergence des objectifs des membres par rapport à ceux des chefs syndicaux est bien établie. Une telle divergence a été expliquée par le caractère de plus en plus bureaucratique, routinier et centralisé de nombreux syndicats en milieu de travail. Le risque est en effet le suivant : plus l’appareil syndical devient puissant et professionnel, plus la probabilité d’un écart entre le point de vue d’une ou d’un chef et celui des membres de la base augmente. Selon un autre point de vue, les membres ordinaires peuvent jouer un rôle crucial pour contrer un tel état des choses en définissant à la fois les questions de fond du syndicat et les styles de comportements que les représentantes et représentants syndicaux peuvent adopter. De cette manière, l’interaction entre le style de leadership syndical et les attitudes des membres est davantage perçue comme un phénomène bidirectionnel.

Les études dont il a déjà été fait mention portaient aussi sur les styles de leadership dans la mesure où ils se rapportent à la conservation de l’équipe syndicale, à savoir les dirigeantes et dirigeants et les délégué‑e‑s au niveau local. Les réponses des répondantes et répondants à un sondage auprès des représentantes et représentants locaux ont montré que les facteurs de persistance, ou de précarité, de leur engagement pourraient se regrouper nettement en une seule catégorie – leurs besoins/leurs désirs et l’incidence des styles de leadership de leurs supérieurs sur ces besoins et désirs.

Les réponses au sondage ont particulièrement fait ressortir que les styles de leadership des dirigeantes et dirigeants syndicaux qui ne favorisaient pas l’habilitation des membres ou la délégation du pouvoir, qui ne reconnaissaient pas suffisamment ou ne récompensaient pas la réussite ou le succès ou qui avaient tendance à ne pas inclure une recherche efficace de l’obtention de l’apport de l’équipe, étaient des styles qui causaient une perte d’intérêt et de motivation chez les autres militantes et militants, qui abandonnaient leur action au sein du syndicat et se lançaient dans d’autres entreprises. En fait, de nombreuses réponses au sondage ont révélé que certaines travailleuses et certains travailleurs avaient joint les rangs de la direction, un milieu où, à leur avis, leur opinion était sollicitée et leurs réalisations, reconnues.

Beaucoup de répondantes et répondants ont aussi dit avoir perdu tout intérêt envers la mobilité syndicale et le rôle de représentante ou de représentant syndical en général à cause de l’hostilité des critiques injustifiées et du comportement agressif dont ils avaient fait l’objet de la part d’autres représentantes et représentants syndicaux à l’occasion d’élections suscitant des intérêts contraires. Certaines répondantes et certains répondants ont dit avoir quitté leur rôle de représentante et représentant syndical par suite du favoritisme flagrant dont bénéficiait certains représentantes et représentants syndicaux de la part de cadres syndicaux, sous la forme d’incitatifs, d’avantages, de voyages, de marques de reconnaissance et d’affectations de tâches intéressantes ou de premier plan. D’autres ont par ailleurs dit avoir quitté leur poste par suite du manque d’appui en provenance des cadres syndicaux et de leurs collègues. Enfin, des répondantes et répondants ont indiqué, dans une proportion importante, qu’ils avaient abandonné leur poste par suite de désaccords avec des cadres syndicaux et des collègues sur la question du style militantiste et ouvertement agressif adopté dans le cadre des discussions avec l’employeur.

Les répondantes et répondants qui ont dit assumer depuis raisonnablement longtemps le rôle de représentante ou représentant syndical et avoir un intérêt renouvelé ou persistant envers le syndicat ont dit que leur persistance était, notamment, attribuable à des facteurs clairement associés au style de leadership de leurs supérieurs et collègues syndicaux. Ils ont surtout précisé que lorsque leurs besoins et aspirations étaient en partie satisfaits à cause de l’impression d’accomplissement et du sentiment de servir les autres, leurs supérieurs et collègues syndicaux, par leur style de leadership, les avaient aidés à satisfaire leurs besoins et leurs aspirations. Parmi les styles de leadership positifs évoqués, ils ont inclus le fait de croire que leurs rapports et leurs recommandations étaient sincèrement recherchés, le fait que leurs réussites importantes étaient publiquement reconnues, le fait d’avoir l’occasion de faire partie intégrante de l’équipe de prise de décisions, le fait de percevoir un sentiment de collégialité et la foi de toute l’équipe dans la cause. D’autres facteurs énumérés incluaient le fait de recevoir des avantages et des incitatifs tangibles, l’établissement de liens sociaux avec des membres de l’équipe syndicale et des membres du syndicat et l’impression d’être « une des pièces d’une machine bien rodée ».

Les résultats du sondage et, en fait, les conclusions tirées d’autres études, montrent que le principal facteur qui contribue à la conservation de l’équipe syndicale est peut-être la perception des styles de leadership et son incidence sur l’équipe. Par conséquent, les dirigeantes et dirigeants syndicaux doivent toujours être conscients non seulement de l’incidence que leurs actes, leurs comportements et leurs décisions peuvent avoir sur les membres de la base et sur l’employeur, mais aussi de cette incidence sur les autres dirigeantes et dirigeants et délégué‑e‑s syndicaux au niveau local. Là aussi, les styles de leadership ne devraient pas être figés et les chefs devraient inviter toute critique utile et constructive de la part des membres de l’équipe sur la façon d’améliorer les styles de leadership. Il est également important que ceux et celles qui doivent assumer des fonctions de chef entreprennent une formation en leadership pertinente et continuent de perfectionner leurs habiletés dans ce domaine puisque le leadership est un facteur fondamental de promotion du militantisme et du soutien des membres.

Un grand nombre des participantes et participants aux ateliers de septembre 2008 sur le conflit au sein des sections locales ont aussi fait écho aux tendances observées dans ces études. Les sections locales efficaces ont dit avoir une approche d’équipe cohésive de l’administration de leur section locale, tandis que celles qui éprouvaient des difficultés dans leurs opérations ont fait état de périodes de conflit, de querelles internes et de divisions. On a dit que ces facteurs concernaient directement le leadership et les luttes de leadership au sein des Exécutifs de section locale.

Une méthode dont on a dit qu’elle aide à réduire les conflits au sein des sections locales et des Exécutifs locaux est la création de statuts et/ou de règlements clairs et complets pour régir les opérations de la section locale ou donner des consignes à cet égard. Par conséquent, dans le prochain module, nous nous pencherons sur la question des Statuts et des Règlements de la section locale.